Damien Verot, directeur marketing et communication de la MUTUELLE DES MOTARDS, nous donne son point de vue sur l'émergence des EDPM (Engins de Déplacement Personnels Motorisés) et sur la nécessité d'encadrer ces nouvelles pratiques
Outsiders Mag : A travers le VAE (Vélo à Assistance Electrique), la technologie de la propulsion électrique a amorcé l’assaut de l’univers du deux-roues. La Mutuelle des Motards a fait un premier pas dans cette direction en concotant des contrats d’assurance pour les loueurs de VAE. Au vu de leur puissance et de leur valeur, même les particuliers vont avoir besoin de contrats d’assurance solides non ?
Damien Verot : La Mutuelle des Motards, c’est 37 ans au service des conducteurs de deux-roues motorisés, 37 ans au service de cette liberté de rouler. Même si notre cœur de métier concerne à l’origine les gros cubes, nous avons su nous adapter aux évolutions du marché que ce soit d’un point de vue réglementaire ou du point de vue des besoins des conducteurs, qui demeurent avant tout des usagers vulnérables dont la seule carrosserie réside dans leur équipement de protection.
En effet, récemment nous avons assisté à l’arrivée de nouvelles mobilités et en particulier les Vélos à Assistance Electrique. Ce sont les coursiers et les loueurs, les professionnels qui ont été les premiers à nous solliciter sur le sujet de ces contrats d’assurance spécifiques. Depuis maintenant deux ans nous avons une offre qui leur est destinée.
Concernant les particuliers, la réglementation des VAE n’impose pas la responsabilité civile, couvrant les dommages aux tiers en cas d’accident. Mais elle est fortement recommandée, en cas d’utilisation d’un VAE. Je rappelle que celle-ci est intégrée aux contrats d’assurance habitation. Donc pour résumer, lorsque l’on roule avec un VAE et que l’on possède une assurance habitation, on est couvert pour le minimum.
Par ailleurs, il y a la question de la valeur. Le prix moyen d’un VAE se situe aux alentours de 1600 €, et ça peut monter jusqu’à 6000,00€ pour les plus équipés. Dans ce cas là, le contrat d’assurance habitation ne pourra pas forcément suffire. Par exemple, le vélo sera couvert en cas de vol au domicile, mais pas obligatoirement à l’extérieur. Il se peut même avec certains contrats que le vélo ne soit pas couvert dans le cas d’un vol dans le jardin !
Autre exemple, dans le cas d’un accident, le remboursement au tiers ne s’applique, par définition, qu’à celui à qui on aurait pu porter préjudice. Pas à soi-même. Dans la plupart des cas, c’est l’assurance maladie ou la mutuelle qui prendra le relais. Mais dans la situation d’un handicap des suites de l’accident, la responsabilité civile n’interviendra pas.
C’est pour ces besoins et situations très concrètes que nous avons imaginés des contrats à destination des particuliers, ils seront disponibles d’ici la fin de l’année.
Outsiders Mag : Lorsque l’on voit que les trottinettes, skates, gyroroues et autres EDPM atteignent grâce à l’électrique sans problèmes les 25 Km/h pour les modèles bridés, on peut se demander comment les législateurs vont aborder la situation dans les années à venir. D’autant plus que la crise sanitaire du Covid-19 a favorisé le développement de ces modes de déplacement. En 2019 vous annonciez une commercialisation en fin d’année, où en est-on à ce sujet ?
Damien Verot : Comme souvent, les habitudes créent des usages et les usages débouchent sur la création de lois. C’est exactement ce qui s’est passé pour EDPM (Engins de Déplacement Personnels Motorisés). Ce marché a connu ses balbutiements au début des années 2000 mais il n’a véritablement émergé qu’à partir de 2010 pour connaître une croissance explosive par la suite.
Par exemple les trottinettes électriques, en France, ont connu une croissance de 105% en 2019 avec quasiment 500 000 unités vendues. Jusqu’à présent, ce type d’engin était considéré plutôt comme des « jouets », utilisés principalement dans le domaine privé. Mais la multiplication de son usage dans le domaine public a conduit à la parution d’un décret fin 2019 afin de réglementer son utilisation. Par exemple ce décret interdit la circulation sur les trottoirs, rend obligatoire l’usage des pistes cyclables ou les routes dont la vitesse est limitée à 50 km/h. Cette réglementation impose également un âge minimum de 12 ans, une vitesse maximum de 25 km/h et le port du casque obligatoire hors agglomération. Certains aspects demeurent méconnus, comme l’obligation d’être équipés de feux avant et arrières, de dispositifs rétro-réfléchissants, de freins et d’un avertisseur sonore. Ce cadre légal a sécurisé les usagers en termes d’équipement mais il a rendu également obligatoire le contrat d’assurance pour la conduite des EDPM. Nous avons donc travaillé à la conception d’un produit adapté qui devrait voir le jour en même temps que le contrat VAE.
Outsiders Mag : Yamaha, Electric motion, Supersocon, Surron, KTM, Husqvarna et même Harley Davidson, nombreux sont les constructeurs à suivre la déferlante électrique. Certains s’enthousiament pour des raisons écologiques ou simplement pour des questions de confort, d’autres s’inquiètent des composants polluants contenus dans les batteries, comment voyez-vous évoluer l’univers du deux-roues motorisé dans les dix années à venir ?
Damien Verot : Je pense que l’univers du deux-roues motorisé au sens large, de la trottinette jusqu’au gros cube, est vraiment promis à un bel avenir. J’en suis convaincu parce que c’est quand même une vraie liberté de déplacement, c’est un gain de temps, c’est le plaisir de conduire, peu de place pour se garer ; c’est facile, c’est plus économique qu’une voiture et c’est plus écologique. Dans le contexte du Covid-19, le deux- roues peut vraiment se prévaloir de proposer de sérieux arguments : que ce soit en terme de distanciation physique ou de gestes barrières quand on inclue le casque et les gants. Toutes ces raisons donnent une grande confiance dans l’avenir du deux-roues au sens large.
Ensuite ce qui est intéressant avec l’évolution des technologies c’est que finalement, chacun peut avoir son deux-roues en fonction de ses envies de ses contraintes, de son âge, de ses usages. C’est une vraie force pour les deux-roues. Pour de la mobilité multi-modale, on peut transporter la trottinette dans le coffre de sa voiture, l’emmener ensuite dans le train ou les transports en commun et monter dessus pour finir son trajet jusqu’au lieu de travail.
Pour des distances plus grandes ou pour des personnes plus seniors, le VAE est une révolution, il permet de conserver longtemps la dimension plaisir du vélo. Quand on allonge encore les distances, on passe à un cyclo 125 ou au gros cube. Là, en fonction de la moto, la dimension plaisir, sensation, passion va prendre plus d’importance.
A la Mutuelle, nous suivons de près les innovations liées à notre secteur, bien sûr. C’est en ce sens que nous avons organisé une journée dédiée à la E-moto en octobre dernier, pour permettre à l’ensemble de nos collaborateurs de découvrir ces engins aux côtés de pilotes de haut niveau.
Oui, vraiment, le deux-roues à un bel avenir, je pense à la technologie FlexFuel qui permet aux moteurs thermiques de pouvoir utiliser indifféremment de l’essence ou du bio-éthanol par exemple. Il y a aussi un signe extrêmement important de l’intégration de l’électrique dans l’univers de la moto c’est le rétrofit : depuis le 13 mars, les deux et trois roues de plus de 3 ans peuvent faire la bascule et passer d’un moteur thermique à un moteur électrique, ça ouvre des portes assez extraordinaires !